jeudi 19 novembre 2015

LA JONCHASSE

La Jonchasse









Le voile se lève sur un endroit à la lumière tamisée. A côté de lui, quelqu'un bouge. Interloqué, il regarde tout autour de lui. Il est couché dans un lit, avec une jeune femme dont le visage lui est très familier. Au-dessus de lui, il remarque la présence de grosses branches et de branches plus petites. Toutes semblent soutenir la toiture en chaume. Les branches se terminent en grappes de feuilles luminescentes bleues et en fruits.
_ Bonjour, chéri....
Il reporte son attention sur le visage familier. Elle a les yeux grands ouverts, un large sourire et plusieurs mimiques qu'il reconnaît aisément.
_ Bonjour, chérie.... On est où, là ?
_ Chez nous... Où veux-tu que l'on soit ?
_ C'est quoi cet arbre ?
Elle rigole puis elle pose sa main sur son front.
_ Pourtant, tu n'as pas de fièvre ???? C'est le Tyllis lumineux qui porte notre cocon et qui en est le cœur.
Elle cueille deux fruits violets. Elle en mange un puis elle tend le deuxième.
_ Tiens, tout redeviendra clair en ayant goûté à ça.
Le rêveur goûte à ce fruit. La jeune femme se lève puis s'étire. Il la contemple amoureusement car ce corps, il l'admire, depuis des années. Elle finit par le voir.
_ Je te reconnaît bien là..... Debout, mon chéri.... Le soleil ne nous attendra pas.
Il se lève. Il contourne le lit. Ils s'enlacent. Ils s'embrassent et se caressent.
_ ça à l'air aussi réel que....
Elle lui sourit. Elle lui prend la main.
_ Allons se laver !
Elle ouvre un rideau qui fait office de porte. Ils sortent de leurs maison.
_ Mais on est nus comme des vers !
_ Tu vas bien, ce matin.... ça fait des années qu'on va se laver, dans cette tenue.
Elle le dévisage comme si elle le prenait pour un fou. Ils reprennent leurs marches. Des volutes de fumées sortent de leurs bouches. Pourtant, personne n'a l'air d'avoir froid. La plante de leurs pieds nus foule de l'herbe humidifiée par la rosée du matin. Du coup, notre rêveur en profite pour mieux regarder les lieux, en se comportant le plus naturellement du monde. Il voit une petite dizaine de maisons circulaires. Les mûrs sont en pierres. Elles n'ont pas de fenêtres et ont toutes en leurs cœurs, un tronc qui s'élève. L'arbre en question est beaucoup plus grand qu'un peuplier. Son feuillage ressemble beaucoup à celui du chêne mais ses fruits sont nombreux et variés. Ils sont bien loin de ressembler au gland.
_ Tu ne vas pas me dire que tu ne reconnais pas, ta patrie, La Jonchasse ?
_ Bien sûr que non...

Ils arrivent devant une grosse cascade. Ils contournent de gros rochers puis ils marchent sur de beau blocs de pierres avant de s'immerger dans la retenue d'eau qui découle de la cataracte. La jeune femme prend une espèce de bol que l'on devine fait de végétal. Elle plonge la main dedans puis elle se malaxe le cuir chevelu, avec le gel pris. Le rêveur fait de même. Pour se rincer, tous les deux s'immergent totalement. Ensuite, ils grimpent sur un gros rocher plat. Là, ils s'enduisent d'un produit jaune-orangé, qui se trouve dans un autre bol. Une fois que tous le corps en a reçut, ils s'embrassent puis ils attendent quelques instants. Enfin, ils plongent dans l'eau. Ceci fait, ils ressortent de la cascade juste à côté d'un flux d'eau qui continue son chemin. Sans se sécher, ils rentrent chez eux.

Un clignement d'images plus tard, le couple marche, main dans la main, avec d'autres villageois. Ils sont habillés mais pieds nus. Tous arrivent devant l'entrée d'une grotte, située en contrebas du village. Là, quelques charrettes s'avancent. Elles n'ont ni roues, ni cheval pour se déplacer. Elles sont juste pilotées via une télécommande de contrôle pour les activer ou les désactiver. D'énormes quantités de fruits et de légumes y sont déposées.
_ Direction Perle, maintenant.
_ C'est qui Perle ?
_ Tu sais bien... Le cœur de notre civilisation.
Le convoi emprunte un sentier caillouteux qui descend en pente douce. De part et d'autres, la végétation est luxuriante et colorée. Une multitude d'animaux vaquent à leurs occupations. Sans savoir pourquoi, le défilé d'images s'accélèrent. On voit le convoi arriver à un croisement, puis longer une rivière de bonne largeur. Enfin, ils arrivent, non loin d'une ville. Le défilé reprend sa vitesse normale. Ils traversent un petit pont de pierres puis un second, moins de cent pas plus loin.

La ville est enfin là. Elle trône au milieu d'une île entourée par les eaux de trois rivières.
_ Les Jonchassines fusionnent, ici. Elles vont ainsi former La Jonchasse.
_ Ils sont nombreux à vivre là ?
Elle éclate de rire.
_ J'espère que tu le fais exprès mais tu sais bien que personne ne vît là.
Les autres villageois lui lancent de gros yeux. Le convoi entre dans la dite ville par la seule rue. En tout, Perle est constituée d'une douzaine de bâtisses. Les charrettes stoppent, au bon milieu de la rue. Des rails signalent que des trains passent par là.
_ Il n'y a plus qu'à attendre.
_ Quoi ?
_ Tu sais bien ? Nos fruits et légumes sont attendus à Densréa et Valamour.
D'autres charrettes se joignent à eux. Elles proviennent d'autres villages. Naturellement, on se salue.
_ Vous avez été voir si on a des messages ? Si les sismographes ont enregistrés quelques choses ?
_ Bonne idée, tiens.... Pierre et Maïa vont y aller ! Comme ça, Pierre pourra se remettre en phase avec nous.
La jeune femme serre la main de son amant avant de l'entraîner, loin de la foule.

Un clignement d'images plus tard, le couple se trouve dans un bâtiment gigantesque, en pierres. De forme circulaire, il est dominée par un large dôme finement sertis d'or et couvert de dessins à vocations astronomiques. Le centre de l'édifice est occupé par une espèce de table gigantesque de forme circulaire. La jeune femme active un ensemble impressionnant de technologies.
_ Wow... Pourquoi faut-il se rendre, sur cette île, pour voir votre savoir-faire ?
_ Tu as aujourd'hui, décidé de passer pour un débile ou quoi ?
Plusieurs hologrammes trônent au-dessus de la dite table. Le plus gros d'entre eux est de forme circulaire. Les tracés forment les contours de continents et d'îles.
_ Qu'est-ce qui est arrivé à la Terre ?
Immédiatement, sa compagne le scrute avec de gros yeux. De plus en plus, elle trouve le comportement de son amant comme suspect.
_ Il y a plus de sept mille ans que nous avons quitté la Terre. Ici, tu es sur Lyaluamma. En Jonchasse, où notre peuple vît en symbiose avec le Tyllis lumineux et où nous foulons nos terres, pieds nus, été comme hiver. Maintenant, s'il vous le voulez bien, cher ami, j'aimerai bien récupérer mon amoureux !
_ Mais, naturellement.
Pour donner le change, il reporte son attention, sur un écran virtuel, où défilent une multitude d'informations qu'il arrive à déchiffrer. Il remarque la présence d'une dépression gigantesque dénommée Éternité, au-dessus de Tallyrra, une île isolée au milieu du Grand Océan.
_ Il y en a qui doivent morfler ?
La jeune femme regarde les données concernant la fameuse tempête.
_ Pas plus que d'habitude.... D'ailleurs, je pense qu'on ira, prochainement, les voir....
La terre se met à trembler. Les deux tourtereaux se blottissent l'un contre l'autre, sans avoir peur de l’événement. Malgré sa force, la secousse n'ébranle même pas l'imposante bâtisse.
_ ça va ?
_ Oui... Je ne me rappelle pas, en avoir ressentie une, aussi puissante ?
Immédiatement, on regarde les données.
_ Six et demi.... Épicentre à une vingtaine de kilomètres d'ici, au cœur de la Jonchassine métallique.
_ Des dégâts à craindre ?
_ Ce n'est pas dit.... Je vais contacter toutes les salles communes.... Pour voir si j'ai un retour....
_ Plus forte secousse depuis deux mille cinq cent ans !
La carte de la Jonchasse apparaît sur un nouvel écran... Et en 3D. Le rêveur y voit très bien les trois Jonchassines serpenter depuis leurs sources, dans les montagnes dont l'agencement semble former un U. Toutes les trois se rejoignent autour de Perle, avant de continuer leurs chemin en direction du Nord puis Nord-Ouest. Rapidement, les premiers points lumineux apparaissent. Souvent, ils sont plutôt proche de la fameuse capitale.
_ Je commence à avoir des retour.
Petit à petit, les points lumineux s'éloignent vers les extérieurs de la Nations.

_ Parfait, à priori, il ne manque personne.
Le rêveur ne sait pas pourquoi mais toujours est-il qu'il tomba, à la renverse. Le voile se ferma sur ce monde et Pierre se réveilla, au bon milieu de la nuit, chez lui. Il jette un coup d'oeil pour constater que son épouse dort paisiblement. Il l'embrasse, sur le front, puis il regarde l'heure avant de se rallonger puis de refermer ses yeux.




9 novembre 2015

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